"Le sport m'a accompagné toute ma vie", résume ainsi cet ancien joueur de tennis de table confirmé, qui fut champion de l'Oise dans sa jeunesse.
Enseignant pendant 15 ans dans un lycée d'Albert, petite ville de la Somme, il quitte son métier d'origine à 39 ans pour ouvrir un premier magasin d'articles de sport. "On m'a traité de fou", se souvient-il aujourd'hui, à la veille du match contre Paris "un des big five européens" au budget vingt fois supérieur à son club.
Ce natif de Beauvais fonde alors Prosport, qui devient au fil du temps le plus gros franchisé Intersport de France, avec aujourd'hui une trentaine de magasins employant un millier de salariés, essentiellement dans le nord, mais aussi à Paris intra-muros. Un groupe qu'il développe avec sa femme et son fils.
Amoureux de l'Amiens SC qu'il sponsorise depuis des années, il tente, à plusieurs reprises, d'en prendre la présidence. Il y parvient finalement en 2009, succédant au duo historique Pascal Pouillot-François Gossart.
Joueur de cartes
Un baptême du feu terrible pour l'entrepreneur amiénois : l'équipe descend en National alors qu'elle ne s'était jamais retrouvée en position de relégable avant la dernière journée... Suivront trois saisons de galère dans l'antichambre du football professionnel. Une épreuve qui renforce sa volonté. "Il y a trois ans, on perdait notre statut de club pro, rappelait-il aux partenaires et actionnaires lors de ses vœux présentés voici quelques jours. Et pourtant, grâce à un élan de chefs d'entreprise qui se sont regroupés, qui se sont battus, qui ont cru en notre projet, le club évolue à présent pour la première fois en Ligue 1."
Joueur de cartes chevronné, Bernard Joannin, qui s’entretient physiquement tous les jours, est un "compétiteur, qui a toujours été passionné par le sport" selon Alain Gest, président d'Amiens Métropole, qui le connait depuis 45 ans. "Il a appris à connaître le milieu du foot, a su s'entourer et déléguer aux bonnes personnes", poursuit l'élu. Et "s'il peut parfois être perçu comme distant, ou taciturne, c'est aussi parce qu'il est dans sa propre réflexion".
Si son club présente un bilan sportif très satisfaisant à la trêve (13e), Bernard Joannin aura en revanche connu une sacrée tempête extra-sportive lors de l'effondrement d'une barrière au stade de la Licorne le 30 septembre, faisant 29 blessés parmi les supporteurs visiteurs lillois.
Le soir même, ses propos avaient en effet semblé rejeter la faute sur les supporters : "Il n'y a pas de problème de barrière. Les services de police nous avaient prévenus que 200 ultras très énervés étaient dans le parcage réservé aux Lillois. Ils se sont lancés de façon désordonnée, plus de 500 personnes, sur cette barrière qui était en parfait état".
"Ce n'était pas très adroit de mettre en accusation les victimes", reconnait Alain Gest. "Mais c'est la première fois qu'il était confronté à un évènement tragique. Il s'est excusé ensuite. N'empêche qu'il s'est aussi interrogé sur un vrai sujet".