L'heure du bilan est-elle venue ? Certainement pas. En revanche, un mois et demi après l'ouverture du mercato estival et surtout neuf mois après la prise de pouvoir de Frank McCourt, on peut tirer les premiers enseignements de la politique de recrutement et des moyens de l'Olympique de Marseille. Depuis janvier, huit nouveaux joueurs ont rejoint l'OM. Neuf si on rajoute Lucas Ocampos de retour de prêt. Si on tient compte des options d'achat pour Thauvin et Njie, recrutés sous l'ancien régime mais payés par la nouvelle direction, plus de 85 millions d'euros ont été dépensés. Plutôt de manière cohérente puisque ce ne sont quasiment que des titulaires en puissance. Lors du rachat, Frank McCourt en personne avait annoncé sa volonté d'investir 200 millions d'euros en quatre ans. Une information rapidement rectifiée puisque cette somme devrait être injectée plus rapidement.
Mandanda, le grand retour
Les millions alignés et le profil des éléments recrutés en disent long sur la stratégie et sur ce que peuvent attendre les supporters marseillais. Dès le départ, on savait que Frank McCourt n'avait pas la surface financière pour concurrencer le PSG version Qatar. "Nous sommes des entrepreneurs", répète à l'envi Jacques-Henri Eyraud le président passé par Harvard.
Aujourd'hui, il est évident que l'Américain a les moyens pour bâtir une belle équipe capable de rivaliser avec les meilleurs clubs français et sans doute à terme de se faire une place sur la scène européenne. Mais pour l'heure, il ne boxe pas dans la catégorie des poids lourds. L'OM a changé de braquet par rapport à la fin du règne Louis-Dreyfus mais il demeure dans le gros du peloton. Des joueurs du standing de Rami, Germain ou Sanson auraient très bien pu être recrutés voilà quelques années quand l'OM fréquentait régulièrement la Ligue des champions. Le prix de leur transfert et leur rémunération en témoignent.
Toutefois ne pas faire exploser la banque ne signifie pas que le recrutement de l'OM n'est pas judicieux. Au contraire. Rudi Garcia et Andoni Zubizarreta savent où ils vont et comment. Jusqu'ici les recrues olympiennes obéissent à un souci de sérieusement se renforcer et répondent parfaitement à l'abécédaire de Jacques-Henri Eyraud. Néanmoins, on aimerait que le président de l'OM pousse jusqu'à la lettre E comme émotion ou F comme frisson ou carrément G comme glamour... Car s'il est un point qui peut laisser à désirer, c'est cette absence de sex-appeal dans ce nouvel OM. Tout est carré, solide, propre. Mais il manque l'étincelle. Ce facteur X qui rallume la flamme. Steve Mandanda est adoré par les supporters. Adil Rami est une valeur sûre. Valère Germain a fait ses preuves. Luiz Gustavo est certes une pointure dans son registre mais plus une référence mondiale.
Le mercato d'été n'est pas fini, loin de là, et réservera probablement des surprises. Au moins cinq recrues sont attendues. L'OM peut encore surprendre en réussissant son fameux gros coup. Car c'est sur ce joueur, sans doute un avant-centre, que le projet sera jugé. L'OM Champions Project n'a pas encore trouvé cet étendard qui le rendra identifiable dans le grand cirque. Rudi Garcia n'a pas encore son Lucho Gonzalez ou son Fabrizio Ravanelli, qui avaient marqué les ères Deschamps et Courbis, cette star qui devient le symbole de l'équipe, qui remplit le stade et vend des maillots, même si elle ne fait pas gagner les matchs à elle seule (quoique...). A moins que ce soit Payet dans l'esprit des dirigeants... On n'ose y croire tant l'attente est immense. Dans l'esprit des observateurs, les 30 patates claquées pour rapatrier le meneur de l'équipe de France n'était qu'un succulent apéritif avant le plat de résistance estival.
Le divin cadeau de McCourt se fait toujours désirer. Le grand buteur qui fait fantasmer n'a toujours pas atterri à Marseille. Et la campagne d'abonnements s'est achevée... Certains rêvaient d'un feu d'artifice dès l'entame du mercato à l'image de l'AS Monaco en 2013 qui avait impressionné toute l'Europe en engageant James Rodriguez, Joao Moutinho et surtout Radamel Falcao, considéré comme l'un des meilleurs buteurs du monde, pour 130 millions d'euros ! Le contexte est différent puisque le club de la Principauté effectuait son retour en Ligue 1 et n'avait pas de temps à perdre quand l'OM vient de finir 5e du championnat. La volonté de se renforcer de manière conséquente est réelle mais on peut s'interroger sur le timing.
L'OM avait toute une saison (dite de transition) pour se préparer mais visiblement le football obéit à des règles auxquelles la nouvelle direction ne peut déroger. Elle prend son temps, semble s'adapter au rythme des négociations et avance en fonction de l'attitude des joueurs et des clubs avec lesquels elle discute. Exemple : Olivier Giroud érigé en priorité mais qu'il faut convaincre. Les semaines passent et l'OM n'y est toujours pas parvenu déroulant sa préparation sans l'avant-centre de renom qui officiera à la pointe de l'attaque toute la saison. Cet OM piloté par Garcia et Zubizarreta s'est mis au diapason pour ne pas passer pour un bizut. Frapper fort d'entrée ne sert à rien si c'est pour surpayer un joueur. Attendre fin août vaut peut-être le coup au risque de passer pour des dirigeants qui naviguent à vue. Si Olivier Giroud signe dans les dernières heures du mercato, personne ne s'en plaindra.
L'attaquant français a-t-il le profil de la star décrite plus haut ? Sans aucun doute même si à Marseille, son nom ne fait pas l'unanimité. Le particularisme local fait qu'une partie des supporters préfèrera toujours un Carlos Bacca, Sud-Américain de l'AC Milan, voire même un Nikola Kalinic, Croate de la Fiorentina. Les charmes de l'exotisme sans doute... Mais l'OM est ainsi fait. La méthode américaine impose une vraie révolution des mentalités. Un semestre ne suffira pas. D'autres s'y sont cassés les dents... Car l'OM sera toujours l'OM. La sueur et les larmes doivent couler mais sur les paillettes. Il reste encore un peu plus d'un mois à Eyraud and co pour démontrer qu'ils l'ont compris.